Loi sur la transparence des salaires : quelles obligations pour les entreprises ?

Écrit par Publié le 25/09/2025 Mis à jour le 25/09/2025

La directive européenne 2023/970 impose aux entreprises de nouvelles obligations de transparence salariale, renforçant la communication, le reporting et la structuration des politiques de rémunération. Ce cadre vise la conformité réglementaire et l’équité, incitant à anticiper et sécuriser la gestion des salaires selon les normes françaises et européennes.

En résumé
  • Transparence imposée dès 2026 pour les entreprises de plus de 100 employés, avec publication obligatoire des écarts de rémunération femmes-hommes.
  • Communication de la fourchette salariale obligatoire dans chaque offre d’emploi ; interdiction de demander l’historique salarial des candidats.
  • Droit d’accès renforcé pour les salariés
  • Reporting selon la taille de l’entreprise
  • Sanctions administratives prévues en cas de manquement
  • Respect du RGPD pour les données collectives
  • Outils RH et process à adapter : structuration des grilles, formation, dialogue social renforcé.
  • Opportunités : plus d’équité interne, attractivité RH, prévention des risques juridiques.
Loi sur la transparence des salaires : quelles obligations pour les entreprises ?Loi sur la transparence des salaires : quelles obligations pour les entreprises ?

Cadre légal de la transparence salariale en entreprise

Directive européenne transparence salariale : obligations clés

La directive (UE) 2023/970 du 10 mai 2023 vise à renforcer l’application du principe de l’égalité des rémunérations entre les femmes et les hommes pour un même travail ou un travail de valeur égale, en s’appuyant sur la transparence des rémunérations et des mécanismes d’application du droit. Elle impose aux États membres de transposer ses dispositions dans leur droit national au plus tard le 7 juin 2026.

Les principaux objectifs sont :

  • Garantir l’égalité salariale entre les femmes et les hommes.
  • Renforcer la transparence des politiques de rémunération.
  • Faciliter l’accès à l’information pour les salariés et les candidats.
  • Mettre en place des mécanismes de contrôle et de sanction efficaces.

La transparence salariale constitue un levier stratégique pour renforcer l’équité et la confiance au sein de l’entreprise.

Transposition de la directive UE sur la transparence salariale en France

À ce jour, elle n’a pas encore été transposée en droit français, mais un projet de loi est attendu pour septembre 2025, avec une entrée en vigueur au plus tard en juin 2026. 

Le droit français dispose déjà de dispositifs en matière d’égalité salariale et de reporting (index égalité professionnelle, BDESE), mais la directive va imposer des obligations supplémentaires, notamment en matière d’information à l’embauche et de publication des écarts de rémunération.

Confidentialité vs transparence salariale : ce qui change

Traditionnellement, la rémunération était considérée comme une donnée confidentielle. La directive européenne bouleverse ce paradigme en imposant une transparence accrue, tout en prévoyant des garanties pour la protection des données personnelles et la confidentialité des informations sensibles.

Obligations d’information salariale lors de l’embauche

Mention obligatoire de la fourchette de salaire dès l’offre

L’une des innovations majeures de la directive est l’obligation, pour l’employeur, de communiquer la rémunération de départ ou la fourchette de salaires dans l’offre d’emploi ou, au plus tard, avant le premier entretien. Cette information doit être fondée sur des critères objectifs et non sexistes, permettant au candidat de négocier en toute transparence.

À retenir

  • La fourchette de salaire doit être claire, précise et accessible dès la phase de recrutement.
  • Les critères de fixation de la paie doivent être objectifs et non discriminatoires.

Interdiction de demander le salaire antérieur du candidat

La directive interdit expressément à l’employeur de demander au candidat des informations sur sa rémunération antérieure, que ce soit lors de l’entretien ou dans le processus de recrutement. 

Cette mesure vise à éviter la reproduction d’inégalités salariales et à garantir une évaluation fondée sur les compétences et la valeur du poste.

Sanctions en cas de non-respect de la transparence salariale

Le non-respect de ces normes européennes expose l’employeur à des sanctions administratives, qui pourront être proportionnelles à la masse salariale ou forfaitaire selon la gravité du manquement. Les diffuseurs d’offres d’emploi sont également concernés par ces obligations.

Transparence salariale pendant le contrat de travail

Droit d’accès du salarié à l’information sur les salaires

Pendant le contrat, les employés peuvent demander des informations sur leur rémunération et celle des postes comparables, l’employeur devant rendre accessibles les critères de fixation et d’évolution de la paie, qui doivent être objectifs et non discriminatoires.

Obligation annuelle d’informer les salariés de leurs droits

L’employeur a l’obligation de rappeler chaque année aux employés l’existence de ce droit à l’information. Ce rappel doit être formalisé et accessible à tous les salariés.

Critères objectifs et non discriminatoires pour la rémunération

La réglementation impose des critères objectifs, transparents et non discriminatoires - tels que les diplômes, les expériences, les compétences et l’ancienneté - pour fixer et faire évoluer la paie. Elle exige la formalisation des grilles et processus d’évaluation, la clarté des modalités de rémunération variable. 

L'assistant IA dans Liaisons Sociales

Accédez à des réponses juridiques fiables et précises grâce à l'IA, intégrée à Liaisons Sociales et alimentée exclusivement par nos fonds éditoriaux

Publication et reporting obligatoires des écarts de salaires

Quelles entreprises sont concernées ?

Le texte européen impose des exigences de publication et de reporting aux entreprises d’au moins 100 salariés. Les seuils sont les suivants :

  • Entreprises de 250 employés et plus : publication annuelle.
  • Entreprises de 100 à 249 salariés : publication tous les trois ans.

Méthodologie pour le calcul et la publication des écarts

Les entreprises doivent publier :

  • La différence de salaire entre les femmes et les hommes.
  • La disparité sur les composantes variables et complémentaires.
  • La valeur médiane de rémunération.
  • La proportion de femmes et d’hommes dans chaque quartile de rémunération.
  • L’écart de traitement par catégorie de travailleurs.

La méthodologie, transparente et précise, doit être intégrée à la BDESE pour garantir la clarté des informations communiquées.

Renforcement de l’index égalité professionnelle

En France, l’index égalité professionnelle, déjà obligatoire pour les entreprises de plus de 50 salariés, sera renforcé et adapté pour intégrer les nouveaux indicateurs prévus par la prescription européenne. Les entreprises devront procéder à une évaluation conjointe avec les représentants du personnel si l’écart de rémunération dépasse 5 % et n’est pas justifié par des éléments objectifs.

Confidentialité, RGPD et gestion des données salariales

Les employeurs doivent garantir la confidentialité des données salariales et se conformer strictement aux exigences du RGPD lors de leur traitement.

Sanctions et contentieux liés à la transparence des salaires

En cas de non-respect des obligations de transparence salariale, des amendes administratives sont prévues, aggravées en cas de récidive. L’employeur doit prouver l’absence de discrimination en cas de litige. Les salariés victimes peuvent obtenir réparation, y compris des dommages et intérêts, et bénéficient d’une protection contre les représailles s’ils exercent leurs droits ou agissent en justice. 

Comment structurer une politique de rémunération transparente ?

Définir des critères objectifs pour la rémunération

Pour structurer une politique de rémunération transparente, il faut définir des référentiels objectifs, transparents et non sexistes (grilles de classification, référentiels de compétences, barèmes d’ancienneté, modalités d’attribution des primes). L’élaboration de tableaux de rémunération clairs et accessibles garantit la conformité et facilite la communication interne.

Rôle des représentants du personnel dans la transparence salariale

Le dialogue social constitue un levier essentiel pour la mise en conformité et la réussite de la transparence salariale. 

La directive encourage une implication renforcée des représentants du personnel, notamment par : 

  • la consultation obligatoire du CSE sur les politiques salariales, 
  • leur participation à l’évaluation conjointe des écarts de rémunération
  • et un rôle accru dans la négociation des mesures correctives

Quels seront les impacts de la transparence des salaires sur les femmes dans le milieu professionnel ?

La transparence salariale, imposée par la directive européenne, aura un impact significatif sur la situation des femmes au travail. En France, l’écart salarial à poste et temps équivalents reste de 4,3 % en défaveur des femmes. La publication obligatoire des écarts de rémunération par catégorie professionnelle et l’accès aux critères de fixation des salaires rendront visibles les inégalités et inciteront les employeurs à adopter des politiques plus équitables. L’interdiction de demander l’historique salarial lors du recrutement limitera la reproduction des inégalités passées. Les femmes pourront demander des informations sur leur rémunération et celle de collègues comparables, renforçant leur capacité à négocier et à contester les discriminations. Si un écart injustifié dépasse 5 %, l’employeur devra agir et prouver l’absence de discrimination. Malgré des risques d’uniformisation des salaires ou de tensions accrues, la transparence salariale est un levier clé pour l’égalité professionnelle et la confiance dans l’entreprise.