Tableaux de rémunération : comment bien les structurer pour respecter la réglementation ?

Écrit par Publié le 21/07/2025 Mis à jour le 21/07/2025

Découvrez comment structurer un tableau de rémunération à la fois conforme aux exigences légales et adapté aux enjeux RH. Cet article propose une méthodologie rigoureuse, des bonnes pratiques applicables, un panorama des risques juridiques, des outils pour digitaliser la gestion salariale, ainsi que des conseils pratiques pour garantir transparence et conformité dans votre politique de rémunération

En résumé
  • Un tableau de rémunération détaille tous les éléments du salaire.
  • Il garantit la conformité légale et l’égalité salariale.
  • Respecter le Code du travail et les conventions collectives est obligatoire.
  • Mentionner poste, coefficient, salaire de base, primes et avantages.
  • Comparer les rémunérations hommes/femmes et entre services.
  • Adapter la structure du tableau à la taille de l’entreprise.
  • Intégrer les grilles de classification conventionnelles.
  • Mettre à jour et archiver le tableau au moins une fois par an.
  • Utiliser des outils RH pour digitaliser et sécuriser la conformité.
  • Communiquer clairement la grille de rémunération aux salariés.
Tableaux de rémunération : comment bien les structurer pour respecter la réglementation ?Tableaux de rémunération : comment bien les structurer pour respecter la réglementation ?

Qu’est-ce qu’un tableau de rémunération ?

Un tableau de rémunération est un document structuré qui présente de manière détaillée les différents éléments de rémunération des salariés au sein d'une entreprise. 

Un tableau de rémunération inclut généralement :

  • le salaire de base, 
  • les primes 
  • les avantages en nature,
  • et d'autres composants de la rémunération tels que définis dans le contrat de travail

Il permet de visualiser et de comparer les rémunérations selon divers critères tels que : 

  • le poste, 
  • le niveau hiérarchique, 
  • et l'ancienneté.

Enjeux : pourquoi structurer un tableau de rémunération ?

Structurer un tableau de rémunération est essentiel pour plusieurs raisons :

  • Respecter les obligations légales en matière de transparence et d'égalité salariale.
  • Assurer une communication claire et transparente des politiques de rémunération aux salariés.
  • Garantir l'égalité de rémunération entre les hommes et les femmes pour un même travail ou un travail de valeur égale.

Les obligations légales encadrant les tableaux de rémunération

Le cadre juridique de la rémunération

Le cadre juridique de la rémunération repose sur un ensemble de règles destiné à garantir l’équité salariale entre les salariés, en particulier en matière d’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes.

  • Code du travail : articles L3221-1 et suivants
    L’employeur doit assurer l’égalité de rémunération entre les hommes et les femmes pour un même travail ou un travail de valeur égale (C. trav., art. L. 3221-2). Les différents éléments de la rémunération doivent être établis selon des normes identiques pour tous les salariés, en fonction des catégories, des critères de classification et des bases de calcul de la rémunération (C. trav., art. L. 3221-6).
  • Jurisprudence : égalité à travail égal
    La jurisprudence sanctionne les inégalités salariales non justifiées. Les différences de salaire doivent être justifiées par des éléments objectifs et pertinents (ex. : Cass. soc., 6 juillet 2022, n° 21-12.935).
  • Conventions collectives : application obligatoire des minima conventionnels
    Les conventions collectives imposent des minima salariaux à respecter. Ces minima sont définis par des grilles de classification à intégrer dans les tableaux de rémunération.

Transparence et égalité salariale

La transparence et l’égalité salariale sont aujourd’hui des enjeux majeurs pour les entreprises. Afin de lutter contre les écarts de rémunération entre les femmes et les hommes, la législation française impose plusieurs obligations aux employeurs, notamment en matière de publication et de diffusion d’informations.

Parmi ces obligations, on retrouve :

  • Obligation d’affichage de l’Index égalité professionnelle femmes-hommes :
     Les entreprises d’au moins 50 salariés doivent publier chaque année l’Index de l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes. Cet index inclut des indicateurs relatifs aux écarts de rémunération, permettant de mesurer et de rendre visible la situation de l’entreprise en matière d’égalité salariale. Cette publication doit être réalisée de manière visible et lisible, notamment sur le site internet de l’entreprise lorsqu’il existe, ou à défaut, par tout autre moyen à la connaissance des salariés. 
  • Lien avec la BDESE (Base de Données Économiques, Sociales et Environnementales) :
    Le tableau de rémunération, ainsi que les indicateurs relatifs à l’égalité professionnelle, doivent être intégrés dans la BDESE. Cette base contient des informations essentielles sur l’égalité professionnelle, les conditions de travail et les rémunérations, et permet d’assurer la transparence auprès des représentants du personnel et des salariés.

Ces obligations visent à garantir une meilleure information des salariés et de leurs représentants, à favoriser la négociation collective sur l’égalité professionnelle et à inciter les entreprises à corriger les écarts de rémunération constatés.

Mentions minimales dans un tableau de rémunération

Pour assurer une bonne organisation et une transparence des rémunérations, voici les éléments clés à inclure dans le tableau de suivi des postes et salaires :

  • Poste / emploi repère : Chaque poste ou emploi repère doit être clairement identifié dans le tableau.
  • Niveau / coefficient hiérarchique : Le niveau ou coefficient hiérarchique, souvent défini par les conventions collectives, doit être mentionné.
  • Salaire de base, primes, avantages en nature : Le tableau doit inclure le salaire de base, les primes (telle que la prime d'ancienneté), et les avantages en nature.
  • Comparatifs internes (hommes/femmes, services équivalents) : Il est essentiel de comparer les rémunérations entre hommes et femmes et entre services équivalents pour garantir l'égalité salariale.

L'assistant IA dans Liaisons Sociales

Accédez à des réponses juridiques fiables et précises grâce à l'IA, intégrée à Liaisons Sociales et alimentée exclusivement par nos fonds éditoriaux

L'Assistant IA dans Liaisons Sociales

Et si vous découvriez une nouvelle façon de gagnez du temps ?

Accédez à des réponses juridiques fiables et précises grâce à l’IA, intégrée à Liaisons Sociales et alimentée exclusivement par nos fonds éditoriaux.

Structurer un tableau de rémunération : bonnes pratiques

Choisir la bonne architecture

Le choix de l’architecture du tableau de rémunération dépend de la taille et de la complexité de l’entreprise. 

Un tableau simple, listant les postes et les niveaux de rémunération associés, peut suffire pour les petites structures. 

En revanche, pour les entreprises de taille importante ou comportant une grande diversité de métiers, il est recommandé d’opter pour un tableau matriciel. 

Le tableau matriciel permet de croiser plusieurs critères : 

  • famille métier,
  • niveau de qualification,
  • ancienneté

Il facilite ainsi la comparaison des rémunérations entre postes équivalents. 

La codification des postes selon ces critères est essentielle pour garantir la lisibilité et l’objectivité du tableau, tout en facilitant les analyses d’équité interne.

Intégrer les grilles de classification

L’intégration des grilles de classification issues des conventions collectives applicables (par exemple, SYNTEC ou Métallurgie) est indispensable. 

Ces grilles fixent : 

  • les niveaux de qualification, 
  • les coefficients 
  • et les minima salariaux à respecter. 

Le rattachement de chaque poste aux coefficients conventionnels permet d’assurer la conformité légale et l’équité de traitement entre les salariés. Cette démarche garantit également que la politique de rémunération de l’entreprise respecte les obligations conventionnelles et légales en matière de classification et de rémunération minimale. 

Actualiser et documenter les données

Il est recommandé de procéder à une mise à jour du tableau de rémunération au moins une fois par an, afin de tenir compte des évolutions légales, conventionnelles ou internes (revalorisations, promotions, etc.). 

Par ailleurs, la conservation de l’historique des tableaux de rémunération est essentielle : elle permet de justifier la conformité de la politique salariale lors d’un audit ou d’une inspection du travail. Cette traçabilité constitue une preuve de la régularité des pratiques de l’entreprise et de sa capacité à répondre aux exigences de transparence et d’équité.

Cas d’étude : les risques d’un tableau de rémunération non conforme

Un tableau de rémunération non conforme expose l’employeur à des risques juridiques majeurs. Selon la jurisprudence, notamment l’arrêt de la Cour de cassation du 3 mai 2018 (n° 16-26.385), la constatation d’inégalités ou de discrimination salariale peut entraîner la requalification de la situation, l’octroi d’un rappel de salaire au salarié lésé, ainsi qu’une indemnisation pour préjudice moral.

Cas d’une entreprise n’ayant pas aligné les salaires d’un même poste à égalité de compétence

Une entreprise a été condamnée pour rupture d’égalité professionnelle après avoir refusé d’aligner les salaires de femmes occupant des postes équivalents à ceux de leurs collègues masculins, malgré des compétences et responsabilités identiques.

Illustration d’un audit interne révélant des écarts inexplicables H/F

Un audit interne peut révéler des écarts de rémunération inexpliqués entre hommes et femmes, mettant en lumière l’absence de justification objective et exposant l’employeur à des sanctions civiles et pénales.

L’inspection du travail joue un rôle clé en vérifiant la conformité des tableaux de rémunération, des bulletins de paie et de la BDESE. 

Lors d’un contrôle, et afin de démontrer l’égalité de traitement et la transparence salariale, l’employeur doit présenter :

  • la grille des salaires,
  • les bulletins de paie 
  • et la BDESE

Tableau de rémunération et outils RH : digitalisation et conformité

La digitalisation des tableaux de rémunération via des outils RH comme Lucca, Talentsoft ou des fichiers Excel structurés optimise la gestion, le suivi des évolutions et le reporting RH en temps réel, tout en facilitant la conformité réglementaire. 

Ces solutions permettent d’assurer la cohérence avec la politique de rémunération et de performance de l’entreprise, et de garantir l’alignement avec les valeurs de transparence salariale exigées par la directive européenne et la législation française. La traçabilité et l’accessibilité des données renforcent la transparence et la fiabilité des processus de rémunération. 

Conseils pratiques pour une structuration conforme

Élaboration d’une check-list juridique

Pour garantir la conformité des tableaux de rémunération, il est recommandé de s’appuyer sur une check-list juridique intégrant les points suivants :

  • Identifier les éléments constitutifs de la rémunération : inclure le salaire de base, les avantages en nature, les primes, les accessoires du salaire, ainsi que les majorations pour heures supplémentaires ou complémentaires, conformément aux dispositions légales et conventionnelles applicables, et l’indemnité de congés payés, conformément aux dispositions légales et conventionnelles applicables.  
  • Garantir des critères objectifs et non sexistes : s’assurer que les critères utilisés pour déterminer la rémunération, les niveaux et la progression salariale sont objectifs, pertinents, non sexistes et justifiés, en cohérence avec la directive européenne sur la transparence des rémunérations. 
  • Vérifier la conformité avec la directive européenne sur la transparence salariale : contrôler que la grille de rémunération permet la comparaison pour un même travail ou un travail de même valeur, selon des critères de compétences, responsabilités, efforts et conditions de travail, et que les salariés peuvent accéder à ces informations. 
  • Mentionner les modalités de versement : préciser la périodicité et les modalités de paiement de la rémunération, conformément aux articles du Code du travail et aux accords collectifs.

Bonnes pratiques de révision annuelle

La révision annuelle des tableaux de rémunération doit s’appuyer sur les pratiques suivantes :

  • Révision systématique : procéder chaque année à une révision complète des grilles de rémunération pour garantir leur actualité et leur conformité. 
  • Diagnostic des pratiques : auditer la politique de rémunération, identifier les écarts éventuels et leurs causes, et mesurer les conséquences financières d’éventuels ajustements. 
  • Mise à jour des classifications : actualiser les classifications et les critères de progression salariale en fonction de l’évolution des métiers et des compétences. 
  • Association des partenaires sociaux en cas d’écart injustifié : en cas d’écart de rémunération non justifié par des critères objectifs et non sexistes (notamment un écart de 5 % ou plus), organiser une évaluation conjointe avec les représentants du personnel pour identifier, corriger et prévenir les écarts. 

Importance de la communication RH

La communication autour des tableaux de rémunération est essentielle pour garantir la transparence et l’adhésion des salariés :

  • Rendre la grille lisible : veiller à la clarté et à l’accessibilité des grilles de rémunération pour tous les salariés. 
  • Former les managers : former les managers à l’utilisation des grilles et à l’évaluation objective de la performance individuelle, afin de limiter les biais et d’assurer l’équité. 
  • Informer annuellement les salariés : rappeler chaque année aux salariés leur droit à l’information sur leur niveau individuel de rémunération et sur les niveaux moyens par catégorie et par sexe. 
  • Prévoir des supports adaptés : mettre à disposition des supports pédagogiques et des outils de communication adaptés pour accompagner la compréhension et l’appropriation des grilles de rémunération. 

La structuration des tableaux de rémunération est essentielle pour respecter les obligations légales et garantir l'égalité salariale.
Il est crucial d'anticiper et d'actualiser régulièrement les tableaux de rémunération.
Recourir à un conseil juridique pour valider les tableaux de rémunération est recommandé pour garantir la conformité.