Le salarié peut-il refuser d'exécuter une tâche ?
Le salarié doit exécuter les tâches qui lui sont demandées car il est, du fait de son contrat de travail, placé sous la subordination de l'employeur. Autrement dit, le refus de travailler est un motif de licenciement dès lors que les travaux demandés entrent dans les attributions du salarié. Il peut même s'agir d'une faute grave si le salarié persiste dans son refus ou si celui-ci est particulièrement préjudiciable à l'entreprise.
- Un salarié doit exécuter les tâches relevant de ses attributions sous peine de licenciement.
- Un refus répété peut être considéré comme une faute grave.
- Un ordre illicite ou contraire à la sécurité du salarié peut être refusé.
- Un salarié peut refuser une tâche ne correspondant pas à son contrat de travail.
- Seul le médecin du travail peut justifier un refus pour raison de santé.
- Le télétravail depuis l’étranger sans autorisation peut entraîner un licenciement.
- Refuser une formation imposée par l’employeur peut constituer une faute.
- Le refus du salarié d'exercer une tâche demandée est-il un motif de licenciement ?
- Le salarié peut-il refuser d'exécuter une tâche au motif qu'elle ne relève pas de ses attributions ?
- Dans quels cas un salarié peut-il légitimement refuser une tâche relevant de ses attributions ?
- Le télétravail depuis l'étranger sans autorisation est-il un motif de licenciement ?
- La violation du secret professionnel justifie-t-elle un licenciement ?
- Un salarié peut-il légitimement refuser de suivre une formation ?
Le refus du salarié d'exercer une tâche demandée est-il un motif de licenciement ?
Le refus du salarié d'exécuter une tâche entrant dans ses attributions ou d'obéir à un ordre constitue une faute qui, le plus souvent, justifie le licenciement du salarié.
Exemple :
Selon les circonstances, le refus du salarié peut aller jusqu'à constituer une faute grave. Ont été ainsi qualifiés de faute grave :
- le refus d'effectuer une mission en province, alors que cela était prévu au contrat de travail. L'attitude du salarié constituait en effet une violation flagrante de ses engagements. (Cass. soc., 16 mai 2001, no 99-40.736). Il en est de même s'agissant des refus successifs d'affectation sur deux chantiers pour un chef de chantier, alors que ces déplacements s'inscrivaient dans le cadre habituel de son activité (Cass. soc., 2 avr. 2014, no 12-19.573). Idem concernant le refus d'affectation à un autre chantier d'un charpentier bardeur, alors que ce déplacement s'inscrivait dans le cadre habituel de son activité et était justifié par l'intérêt de l'entreprise. En outre, le salarié avait été prévenu dans un délai raisonnable et informé de la durée prévisible de la mission (Cass. soc., 29 janv. 2025, no 23-19.263) ;
- le fait pour un VRP de faire obstruction à toutes les demandes de l'employeur et de ne déférer à aucune injonction (Cass. soc., 11 oct. 2000, no 98-41.183) ;
- le refus persistant du salarié d'exécuter une tâche rentrant dans ses attributions alors qu'il avait déjà été sanctionné à plusieurs reprises pour ce motif (Cass. soc., 27 janv. 1993, no 91-41.217) ;
- le refus réitéré d'exécuter un ordre, accompagné de propos injurieux vis-à-vis du principal client de l'employeur (Cass. soc., 19 mars 2014, no 12-24.531) ;
- le non-respect des consignes données par l'employeur, s'agissant d'une serveuse dans une pizzeria (Cass. soc., 2 avr. 2014, no 13-11.695) ;
- le refus d'exécuter les missions qui incombaient contractuellement au salarié, ce qui a eu un effet désastreux sur les clients et le chiffre d'affaires de la société (Cass. soc., 23 oct. 2013, no 11-13.721) ;
- le refus d'un salarié, sportif professionnel, après un accident du travail, de se prêter aux soins nécessaires à la restauration de son potentiel physique, en violation d'une clause de son contrat de travail (Cass. soc., 20 févr. 2019, no 17-18.912).
Remarque :
Seul un constat d'inaptitude, ou d'aptitude avec réserves, dressé par le médecin du travail peut justifier le refus du salarié d'exécuter certains travaux pour raison de santé. À défaut, l'employeur peut licencier pour insubordination le salarié qui refuse d'exécuter une tâche entrant dans le cadre de sa qualification. En résumé, seul le médecin du travail peut intervenir sur la relation employeur/salarié. À cet égard, l'avis du médecin traitant est inopérant.
Exemple :
Si le médecin du travail est seul juge de l'inaptitude du salarié à son poste de travail, notons que, lorsque le médecin traitant délivre un certificat attestant que l'état de santé du salarié est incompatible avec son travail, ce certificat vaut arrêt de travail : l'employeur ne peut donc licencier le salarié pour son absence puisqu'il l'avait justifiée (Cass. soc., 12 oct. 2011, no 10-15.549). Dans une telle hypothèse, la seule solution pour l'employeur est d'organiser une visite médicale auprès du médecin du travail, afin qu'il se prononce sur l'aptitude du salarié à son poste de travail.
Le salarié peut-il refuser d'exécuter une tâche au motif qu'elle ne relève pas de ses attributions ?
Le salarié a le droit de refuser une tâche qui n'entre pas dans ses attributions. Un licenciement prononcé à la suite de ce refus serait jugé sans cause réelle et sérieuse (Cass. soc., 4 avr. 2001, no 98-45.934).
Exemples :
De même, un ouvrier plombier peut refuser de procéder à la pose de chaudières dès lors que cette tâche n'est prévue ni par son contrat de travail, ni par la convention collective (Cass. soc., 25 nov. 1998, no 96-45.648).
À l'inverse, repose sur une cause réelle et sérieuse, le licenciement d'une aide-comptable qui ne voulait pas faire le classement des livres-journaux. La convention collective indiquait que l'aide-comptable était chargée des travaux courants, variés et diversifiés tels que tenue des livres et comptes. Selon la Cour de cassation, le classement de ces livres rentrait bien dans ses attributions (Cass. soc., 27 janv. 1993, no 91-41.890).
Le salarié a le droit de ne pas exécuter une tâche ne relevant pas de ses attributions y compris si cette tâche est provisoire.
Exemples :
Dans quels cas un salarié peut-il légitimement refuser une tâche relevant de ses attributions ?
Ordre illicite
Le salarié peut et doit refuser d'exécuter un ordre qui l'oblige à enfreindre les dispositions légales. En effet un salarié qui commet une infraction (faux, escroquerie, etc.), sur ordre d'un supérieur hiérarchique, prend deux principaux risques : tout d'abord sa responsabilité pénale peut être engagée si une qualification pénale peut être donnée au fait. Ensuite, dès lors que l'infraction pénale est intentionnelle, il peut être condamné à indemniser les tiers ayant subi un préjudice du fait de cette infraction (Cass. ass. plén., 14 déc. 2001, no 00-82.066).
En revanche, d'un point de vue du droit du travail, si la faute a été commise sur ordre d'un supérieur hiérarchique, celle-ci n'est pas imputable au salarié et ne peut pas donner lieu à un licenciement disciplinaire.
Exemple :
Le refus d'accomplir un acte prohibé par la législation du travail ou par le statut collectif applicable ne constitue pas une faute grave. Ainsi, un salarié employé en qualité de laborantin peut valablement refuser d'effectuer une garde, lorsque l'exécution de celle-ci l'aurait conduit à travailler plus de six jours consécutifs, contrairement à l'interdiction prévue par la convention collective applicable (Cass. soc., 8 juill. 1997, no 95-41.109).
Santé et sécurité
Le salarié peut également légitimement refuser d'exécuter une tâche pour d'autres motifs : sécurité, attitude de la personne qui donne l'ordre, etc. Ainsi, ne peut justifier un licenciement :
- le refus de travailler avec un matériel défectueux – autobus transportant des personnes – (Cass. soc., 24 janv. 1991, no 89-40.662) ;
- le refus d'exécuter son travail dans de mauvaises conditions (mauvaise aération, chauffage défectueux), l'employeur refusant d'apporter des modifications (Cass. soc., 13 mai 1997, no 94-41.844).
Le refus de travailler peut également être légitime si les conditions de travail sont dangereuses, le salarié disposant en effet d'un droit de retrait, ou anormalement pénibles (C. trav., art. L. 4131-1). Lorsque le droit de retrait est exercé de manière légitime par un ou plusieurs salariés ayant un motif raisonnable de penser que la situation de travail présentait un danger grave et imminent pour la vie ou pour la santé de chacun d'eux, aucune sanction ne peut être prise à leur encontre (C. trav., art. L. 4131-3). À défaut, le licenciement prononcé est nul (Cass. soc., 28 janv. 2009, no 07-44.556).
Remarque :
Le télétravail depuis l'étranger sans autorisation est-il un motif de licenciement ?
Le salarié qui s'installe à l'étranger et y télétravaille sans autorisation préalable de son employeur quant au lieu choisi peut être licencié pour faute grave (Cons. prud'h. Paris, 1er août 2024, no 21/06451).
Remarque :
Le licenciement pour faute grave de cette salariée a été validé par le Conseil de prud'hommes de Paris qui a fondé sa décision :
- d'une part, sur le comportement de la salariée qui, en refusant de se conformer aux directives de l'employeur en matière de télétravail et de reprendre son poste en présentiel après une mise en demeure et en adoptant une attitude déloyale par la dissimulation de cette situation, avait violé des obligations résultant de son contrat de travail ;
- d'autre part, sur les risques juridiques encourus par la société en raison notamment de l'activité de la salariée sur le territoire canadien, sans aucune autorisation des autorités canadiennes et en violation des règles sur le règlement général sur la protection des données (RGPD). À noter qu'un tel télétravail clandestin à l'étranger fait également peser sur l'entreprise un risque quant à la réglementation fiscale qui peut varier selon le pays de résidence et aux règles d'affiliation à la sécurité sociale.
La violation du secret professionnel justifie-t-elle un licenciement ?
Justifie un licenciement pour faute grave, le fait pour un salarié de la CPAM de méconnaître l'obligation de secret professionnel à laquelle il est astreint en transmettant à un tiers, sans raison valable, des données personnelles, concernant un ministre en exercice (Cass. soc., 11 sept. 2024, no 22-13.531) ou une personnalité publique (Cass. soc., 11 sept. 2024, no 22-13.532), auxquelles il a eu accès dans le cadre de ses fonctions.
Un salarié peut-il légitimement refuser de suivre une formation ?
Le salarié qui, sans motif légitime, refuse de participer à un stage de formation organisé par l'employeur, peut être licencié pour insubordination (Cass. soc., 5 déc. 2007, no 06-42.904 ; Cass. soc., 3 déc. 2008, no 07-42.196). En effet, l'envoi en formation relève du pouvoir de direction de l'employeur et le refus du salarié constitue une faute légitimant son licenciement.
Un employeur peut également licencier pour faute grave un salarié qui abandonne un stage de formation destiné à l'adapter à son poste de travail (Cass. soc., 13 févr. 2008, no 06-43.785). Est également justifié, le licenciement pour faute grave d'un salarié qui s'est absenté pendant un nombre important d'heures de formation sans motif, sans prévenir son employeur, et alors qu'il s'était contractuellement engagé à suivre cette formation financée par l'employeur (Cass. soc., 17 avr. 2013, no 12-14.635). Il en est de même pour un salarié qui s'est absenté à plusieurs reprises de sa formation sans en aviser l'organisme formateur ni son employeur, en contradiction avec ses obligations professionnelles, et qui n'a pas repris le cours de sa formation en dépit de l'avertissement de l'employeur (Cass. soc., 12 juin 2014, no 13-14.276).